Numéro de collection : 494 Titre : Homélies sur Marc Année de parution : 2006 ISBN : 2204079286 Domaine : Latin Imprimeur : Imprimerie Lavauzelle-Graphic Date de sortie : novembre 2005 Prix du volume en euros : 27.00 Nombre de pages : 240 Tirage : 2500 Etat du stock : 1593 en mars 2006
Œuvre contenue dans ce volume
Homélies sur Marc (370 - 420)
Genre : Sermon
Langue originale : latin
Langue de transmission : latin
Résumé de l'œuvre :
Les dix Homélies sur Marc de Jérôme (SC 494, 232 pages) sont une œuvre doublement originale : avec ses Homélies sur les Psaumes, elles sont le seul témoin conservé de sa prédication et la seule exégèse patristique de Marc un peu ample à nous être parvenue. Curieusement, en effet, du moins à nos yeux, car l'Évangile de Marc est aujourd'hui l'objet d'une grande attention et bénéficie d'une espèce de « valorisation » par rapport aux trois autres évangiles canoniques en raison de son ancienneté, les Pères ne semblent pas l'avoir commenté pour lui-même. En tout cas, rien ne nous est parvenu de l'exégèse plus ou moins continue qu'ils auraient pu en donner, alors que nous possédons des homélies ou des commentaires patristiques assez nombreux sur Matthieu, Luc et Jean. D'autre part, dans leur exégèse, les références directes à Marc sont infiniment moins nombreuses que celles faites aux autres évangiles. On ne trouve, par exemple, que deux homélies prêchées à partir d'un texte de Marc dans les Homélies surl'Évangile de Grégoire le Grand. Il faut, sauf erreur, attendre Bède le Vénérable pour trouver un commentaire continu de l'Évangile de Marc (voir la liste de ses œuvres dressée dans le dernier chapitre de son Histoire ecclésiastique). Cela donne un prix particulier à ces dix homélies de Jérôme.
La paternité de ces Homélies lui a été tardivement contestée, mais de manière peu convaincante comme l'a montré Pierre Jay. La thèse du savant italien, Vittorio Peri, qui voulait les attribuer à Origène et réduire tout au plus le rôle de Jérôme à celui de traducteur, n'a pas emporté l'adhésion des spécialistes. C'est donc à juste titre que Jean-Louis Gourdain, professeur en classes préparatoires de Lettres à Rouen et disciple de P. Jay, qui fut aussi son directeur de thèse de doctorat (Les Psaumes dans l'explication des Prophètes chez saint Jérôme, 1991), les publie aujourd'hui dans « Sources Chrétiennes » sous le nom de Jérôme à partir de l'édition qu'en a donné dom Germain Morin (CCL 78).
La date à laquelle furent prononcées ces homélies, à Bethléem, est difficile à déterminer avec certitude. J.-L. Gourdain avance, avec prudence et en reconnaissant la fragilité de son hypothèse, une date postérieure au début de la controverse origéniste, et propose de les situer après 393, voire après 397. Le public auquel s'adresse Jérôme n'est pas beaucoup plus facile à identifier avec certitude. S'agit-il de moines, comme inviteraient à le croire certaines homélies (Hom. 1, p. 85), ou d'un auditoire composite, comme d'autres homélies paraissent l'indiquer ? Relativement brèves, ces homélies conservent parfois un certain caractère d'improvisation et d'oralité. Ainsi l'Homélie 5 (p. 139) : Jérôme avait prévu de prêcher sur le Psaume du jour, mais un prêtre l'a fait avant lui ; il commentera donc l'évangile de la guérison de l'aveugle de Bethsaïde.
Dans ces homélies, Jérôme observe la même sobriété que dans ses commentaires, son Commentaire sur saint Matthieu par exemple (SC242 et259). Comme Eusèbe et la plupart des Pères, il se montre attentif à résoudre les difficultés que présentent les divergences entre les récits des évangélistes (cf. Hom. 6, p. 155) : pour lui aussi, elles ne sont qu'apparentes. Son attention à la lettre du texte ne lui interdit pas de chercher à atteindre, presque toujours, le sens spirituel, comme le fait Origène, et à souligner, comme lui, dans ses homélies, le passage du sens littéral (historia) à ce sens supérieur, d'ordinaire plus riche pour la vie chrétienne. Il lui arrive même d'avoir à se justifier de faire violence au texte auprès de ceux qui lui reprocheraient un usage excessif de l'allégorie. Ainsi dans son homélie sur la Transfiguration du Christ, où il invoque l'autorité de Paul en Galates 4, 24 :
Nous ne refusons pas l'histoire, mais nous préférons l'intelligence spirituelle. Et ce n'est pas là notre avis personnel, nous suivons l'avis des apôtres et surtout du vase de l'élection (cf. Ac 9, 15), qui a compris pour sa vie ces mots que les juifs ont compris pour leur mort, je veux parler bien évidemment de l'Apôtre, qui dit que Sara et Agar doivent être interprétées comme les deux Testaments, qui correspondent au mont Sinaï et au mont Sion. (...). Est-ce que par hasard Agar n'a pas existé, ni Sara? Est-ce que par hasard le mont Sinaï n'existe pas, ni le mont Sion? Il n'a pas nié l'histoire, mais il a révélé les mystères sacrés (Hom. 6 sur la Transfiguration, p. 156).
A plusieurs reprises, son exégèse de Marc revêt une dimension polémique, contre les Juifs et leur aveuglement venant de leur attachement exclusif à la lettre du texte, et contre les hérétiques. Contre les tenants de l'arianisme, Jérôme affirme avec vigueur la foi trinitaire telle que l'a définie le concile de Nicée. Cette attention portée à la défense de la théologie trinitaire se double chez lui d'une intéressante réflexion christologique sur les deux natures du Christ, à la fois pour réfuter les thèses d'Apollinaire et pour prévenir l'accusation que l'on pourrait lui adresser de diviser le Christ en deux personnes. Jérôme présente sur ce point, dans ces homélies, des développements doctrinaux qu'on ne s'étonnerait pas de lire un siècle plus tard sous la plume de l'Antiochien Théodoret, en pleine crise nestorienne :
Que personne ne pense que nous divisons le Christ. En effet, des calomniateurs s'imaginent d'ordinaire que nous faisons deux personnes en Christ: un homme et un Dieu. Mais nous, nous croyons en la Trinité, nous ne croyons pas en une Quaternité qui mettrait deux personnes en Christ. Car si le Christ est en deux personnes, de même le Fils, c'est-à-dire le Christ, est double: donc il y a quatre personnes. Nous donc, nous croyons au Père, au Fils et à l'Esprit saint... (Hom. 7 sur l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem, p. 181-183).
Ce petit recueil d'homélies hiéronymiennes est donc riche d'enseignements sur les questions exégétiques et doctrinales qui agitaient alors l'auditoire de Jérôme. Il ne s'agit évidemment pas d'un commentaire continu de l'Évangile de Marc, même si le recueil, tel qu'il nous est transmis, suit - mais avec beaucoup de « blancs » - l'ordre des chapitres de cet évangile. (J.-N. Guinot, 2005)